Les phalènes m'avaient entraîné chez Victor Hugo, Émile Littré et Robert – A-t-il un prénom Robert ? –, mais aussi fait remonter aux débuts de l'automobile. Je vous rapporte un extrait du Journal du dimanche du 23/11/1913 :
[...] les mots mettent parfois longtemps avant de trouver leur assiette grammaticale. Rappelons, par exemple, les discussions qui s'élevèrent au début à propos d'automobile.
À peine créé, l'adjectif automobile s'était élevé au rang de substantif et avait mis nos grammairiens dans l'embarras. Un adjectif n'a pas de genre propre, comme chacun sait ; mais l'état civil régulier d'un substantif semble ne pouvoir s'en passer et comporte un choix entre le masculin et le féminin. Le neutre a disparu, de chez nous, Dieu soit loué*, et nous laissons au grec, au latin, à l'allemand autres langues plus raffinées que la nôtre le souci de formuler et d'appliquer la règle de trois.
Encore faut-il choisir entre deux. L'Académie s'est prononcée pour un automobile : or, qui sait si, à l'époque lointaine où elle livrera au public la huitième édition de son Dictionnaire, l'usage ne se sera pas définitivement établi de dire une automobile ? On a remarqué qu'un de ses plus jeunes membres**, dans un roman récent qui a fait quelque bruit, ignore de parti pris le substantif automobile, et n'emploie que la forme familière auto, qu'il fait toujours du féminin.
Enfin, pour illustrer, une photographie de 1914, ainsi légendée : À Trilport, pont détruit par le génie français au moment du passage d'un automobile conduisant des officiers allemands. (source : gallica.bnf.fr)
* Je me demande bien pourquoi.
** Je parierais qu'il s'agit d'Henri Régnier, né à Honfleur.